Participez à la préparation du Café citoyen qui aura lieu le 7 juin à Poitiers en adressant un court texte sur ce qu’évoque pour vous l’expression Mai 68 à cerclecondorcet86@yahoo.com . Une synthèse des contributions servira d’introduction.
En mai 68 j’avais 18 ans, l’année du bac philo au lycée Clémenceau de Nantes (lycée de garçons qui accueillait une vingtaine de filles, c’était pas triste… à l’époque les lycées nantais n’étaient pas mixtes). Les profs ont fait grève, ça discutait fort, mais je n’ai pas vraiment participé aux évènements… par exemple je ne me souviens pas être allée aux manifs sur la fac, peut être une manif dans Nantes… Je défendais les évènements à la maison en discutant ferme avec mes parents qui avaient plutôt une éducation bienveillante, mais regardaient l’électron libre que j’étais avec étonnement, voire incompréhension. J’ai révisé mon bac dans le jardin, car je voulais l’avoir et avais en tête de partir faire mes études ailleurs qu’à Nantes. J’avais déposé des dossiers de candidatures pour 3 IUT Carrières Sociales : Tours, Rennes, ou Bordeaux. J’ai eu mon bac et suis partie à Rennes.
Alors 1968, je l’ai plutôt vécu en 1968/69…les principes d’organisations des études étaient remises au cause. Plus de cours magistraux, nous travaillons en ateliers, en plénières sur le mode collectif en partant de sujets que nous décidions ensemble d’étudier, la parole des profs était écoutée et remise en cause….ah ce que nous avons pu discuter… ! Le recrutement des étudiants (20 par promo) était divers (des jeunes comme moi fraichement moulus et des étudiants plus âgés en reconversion ou des moins jeunes ayant déjà travaillés en reconversion également) C’est là que j’ai commencé à mieux comprendre la politique, à creuser l’histoire politique contemporaine, à m’outiller…à mieux comprendre les enjeux du « collectif », les impasses de la société de consommation galopante dans laquelle j’avais vécu mon enfance et mon adolescence. Elevée sur des valeurs de partage et façonnée par 4 années chez les éclaireurs de France, j’avais acquis de solides bases qui m’éloignaient de l’individualisme qui envahissait les consciences.
Il se dit que mai 68 correspond à la naissance de l’individualisme, concordance des temps, mais mai 68 n’en n’ai pas la cause.
Au contraire, c’est bien à cette époque que sont apparues au grand jour toutes les luttes collectives qui ont construit en partie la société actuelle. Ces luttes idéologiques se sont heurtées politiquement, socialement et philosophiquement aux idéologies « impérialistes » comme on disait à l’époque qui dominaient largement la pensée et étaient bien à l’œuvre et aux commandes dans l’économie et aux gouvernements,(souvenez -vous aux élections qui ont suivi en juin 68, les Français ont largement voté pour la droite). La société marchande a gagné…et encore aujourd’hui on la voir à l’œuvre avec férocité.
Mais les luttes d’aujourd’hui, par exemple pour la défense du service public, pour un meilleur accueil des migrants, pour un respect de la nature, pour la lutte contre la pauvreté et la précarité, pour l’égalité homme /femme.. sont fondées sur ces valeurs que mai 68 avait activées ou ré-activées.
Pour moi mai 68, c’est la naissance de ma conscience politique fondée sur des valeurs humanistes et de combats contre l’âpreté d’un système politique fondé sur l’individualisme et l’enrichissement de quelques-uns au détriment du plus grand nombre. « Individualisme petit bourgeois » disait-on sachons rire tout de même de nos slogans. .. mais qui finalement ne sonnent pas si faux que ça !