Les enjeux de la sortie du Royaume-Uni de l’Union européenne – Café citoyen

Ce Café citoyen s’est tenu au o City’ven à Civray (86), le 2 décembre 2016.

Il a été introduit par les interventions de François HERVOUET Professeur émérite et doyen honoraire de l’Institut de Droit Public de Poitiers et de Michel HENRI, enseignant et membre du bureau de la section de la Vienne du Mouvement européen – France.

Les Cafés citoyens du Cercle Condorcet de la Vienne sont des occasions d’approfondir ses connaissances et de s’interroger sur ses opinions.

L’histoire des relations entre le Royaume-Uni et les communautés européennes, puis l’Union européenne est marquée par la défiance. Il a longtemps été favorable à la création d’un grand marché européen sans souhaiter en être membre.

Sa position évolue pour des raisons économiques et politiques. Les relations économiques du Royaume-Uni sont tournées dans trois directions, l’Amérique du Nord, le Commonwealth, l’Europe. Dans les années 60, il constate que son avenir économique est en Europe. Les empires coloniaux déclinent. Le produit intérieur brut des six pays de la Communauté économique européenne progresse plus vite que celui de l’Angleterre. Suite à la nationalisation du canal de Suez par l’Egypte, une guerre éclate en 1956, menée par une coalition de la France, d’Israël et du Royaume-Uni. Vainqueurs, les envahisseurs se retirent finalement sous la pression conjointe des Etats-Unis et l’URSS. L’Angleterre en tire le constat qu’elle a cessé d’être la grande puissance qu’elle était au sortir de la seconde guerre mondiale.

La première demande d’adhésion du Royaume-Uni à la Communauté économique européenne, en 1961, est rejetée. Suite à une nouvelle demande formulée en 1966, le Royaume-Uni devient membre de la CEE le 1er janvier 1973.

Il a toujours demandé, et obtenu, un statut dérogatoire (notamment sur sa contribution au budget de l’Union et la politique agricole commune). Le « I want my money back » de Margaret THATCHER en 1979 symbolise une vision exclusivement économique de l’engagement européen du Royaume-Uni. Ses positions dans divers domaines ont freiné l’intégration européenne à laquelle il n’est pas favorable.

 

Le Brexit

Le mot Brexit est l’abréviation de British Exit. En réponse au référendum du 23 juin 2016 sur l’appartenance du Royaume-Uni à l’Union européenne, 51,9 % des Britanniques se sont prononcés en faveur de la sortie. A la différence de la France, au Royaume-Uni, ce référendum a une valeur consultative, il n’a pas force de loi. La décision doit être prise par le Parlement.

L’article 50 du Traité sur l’Union européenne prévoit que l’État membre qui souhaite se retirer notifie son intention au Conseil européen, qui présente des orientations pour la conclusion d’un accord fixant les modalités du retrait. Cet accord est conclu au nom de l’Union par le Conseil européen statuant à la majorité qualifiée, après approbation du Parlement européen. Les traités cessent de s’appliquer à l’État qui en fait la demande, dès l’entrée en vigueur de l’accord, ou au plus tard deux ans après la notification du retrait. Le Conseil peut décider à l’unanimité de prolonger cette période en accord avec l’État membre concerné.

 

Brexit, no Brexit, soft Brexit, hard Brexit ?

Le Parlement britannique pourrait refuser de voter le retrait de l’Union européenne. Cela porterait atteinte à la crédibilité du monde politique. En France, l’adoption par la voie parlementaire du traité de Lisbonne, quelques années après le rejet par référendum, en 2005, du traité établissant une Constitution pour l’Europe a laissé des traces.

L’option du soft Brexit consisterait à ce que le Royaume-Uni supporte à peu près toutes les obligations de l’appartenance à l’Union, sans avoir voix au chapitre. Un tel scénario paraît peu probable.

Le calendrier du hard Brexit, la négociation sur la sortie de l’Union, parait limité par l’échéance des prochaines élections au Parlement européen qui devraient avoir lieu en mai 2019. Il serait difficile de mobiliser des votants sur la représentation dans une institution que l’on devrait à terme quitter.

Le référendum, la campagne, les résultats, la situation qui a suivi immédiatement ont manifesté des faiblesses de la démocratie britannique qui ne lui sont pas toutes spécifiques :

  • L’utilisation d’arguments mensongers,
  • L’absence d’une presse capable ou désireuse d’informer réellement la population,
  • Les fractures de la société, géographiques, sociologiques, générationnelles,
  • L’impréparation de la mise en œuvre de la sortie de l’Europe par ses partisans.

La question de la liberté de circulation et d’installation des étrangers communautaires a joué un rôle important dans la campagne pour le référendum. La libre-circulation des personnes dans l’espace européen est un principe fondamental de l’Union, au même titre que la libre-circulation des marchandises, des services et des capitaux. Ils ne semblent pas pouvoir être dissociés.

On peut imaginer que la situation des Britanniques résidant dans les autres pays de l’espace européen et des étrangers communautaires résidant au Royaume-Uni ne sera pas remise en cause. Dans l’immédiat, la dépréciation de la livre sterling entame le niveau de vie des Britanniques expatriés.

L’Ecosse, qui a choisi de ne pas quitter le Royaume-Uni en 2014 et a voté très majoritairement pour le maintien dans l’Union européenne, a publié en octobre un projet de loi pour un nouveau référendum d’indépendance.

 

Les enjeux de la sortie

Il n’est guère possible de prédire les effets de la sortie du Royaume-Uni tant pour lui-même que pour l’Union européenne. On peut cependant dresser la liste des principaux domaines qui vont nécessiter la recherche de nouvelles solutions. Il est probable que tout comme une période de transition est prévue à l’entrée d’un nouveau pays dans l’Union, une période de transition sera nécessaire à la sortie.

Le Royaume-Uni devra renégocier l’ensemble de ses accords commerciaux, avec l’Union européenne mais aussi avec le reste du monde, puisque les accords existants ont été conclus au niveau européen. Le Brexit va modifier la situation de la place financière de Londres. Le président en exercice des Etats-Unis avait exprimé, avant le référendum, son avis défavorable sur le Brexit. Les positions de la future nouvelle administration sur ses relations avec le Royaume-Uni ne sont pas prévisibles. Le Royaume-Uni ne peut donc compter avec assurance sur un rééquilibrage de ses relations commerciales par une intensification de son commerce transatlantique.

La Grande-Bretagne est, avec la France et l’Allemagne, l’un des principaux détenteurs de forces armées de l’Union. Sa position longtemps opposée à une armée européenne était en cours d’évolution.

La Grande-Bretagne est un acteur et une bénéficiaire important de la politique spatiale européenne. Il en va de même pour l’enseignement et la recherche.

 

Un besoin de pédagogie et d’engagement

Le pouvoir de décision au sein de l’Union européenne est partagé entre le Parlement européen composé de parlementaires élus au suffrage universel, pays par pays, et le Conseil européen, composé des chefs d’Etat et de gouvernement des pays membres. La Commission, si souvent décriée, a un pouvoir de proposition et de mise en œuvre. C’est par démagogie que les responsables politiques nationaux se déclarent impuissants face à l’Europe, lui faisant porter la responsabilité de leurs propres choix.

Les apports de l’Europe dans la vie quotidienne, la libre-circulation, la protection de l’environnement, les droits des personnes, le soutien d’activités économiques, des investissements, ne sont pas toujours suffisamment mis en valeur.

Les citoyens qui attendent de leurs élus qu’ils soient porteurs d’un discours promouvant l’intérêt commun et un projet partagé n’est pas suffisamment audible. C’est l’une des ambitions du Cercle Condorcet et du Mouvement européen, à leur modeste place, que d’y concourir.

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